En septembre 1960, les équipes techniques de la Régie Renault présentent la « 8 » aux commerciaux de la marque. Les mines sont déconfites. Personne n’apprécie le dessin pourtant final de la berline de Billancourt !

Au siège, on se presse pour sauver la Renault 8. Un cabinet indépendant est appelé. Avec une équipe réduite, Philippe Charbonneaux se voit confier la charge de transformer le style de la voiture, sans changer – ou presque – le moindre élément.

A l’époque, le touche-à-tout Charbonneaux (brosse à dents, autoroutes ou Delahaye) est à Rennes où il travaille sur les cabines de camions Bernard. Il reçoit un coup de téléphone de Fernand Picard qui lui demande de rappliquer à Rueil-Malmaison pour voir un prototype dont ses designers italiens ne veulent plus entendre parler.

« Incroyable, il ne manquait plus que le tapis rouge pour m'accueillir », se souvient-il. « Après m'avoir fait traverser des hangars pleins de prototypes Renault, on me présenta celui de la voiture qui devait remplacer la Dauphine : une voiture ratée, décalée dans tous les sens. Après l'avoir examinée pendant près d’une heure, je mesurais mieux le sale travail qu'il y avait à faire, tout en gardant la plate-forme telle quelle. »

A cette époque, Renault et Alfa Romeo collaboraient sur plusieurs modèles. En Italie, le projet Tipo 103 était bien avancé et Renault s’en était inspiré pour la 8. Le constructeur milanais laissera ensuite tomber sa Tipo 103 pour présenter la Giulia.

« Dans mon contrat, on me donnait carte blanche pour un mois, seul avec une douzaine de compagnons tôliers formeurs recrutés dans toute la France », racontait Charbonneaux dans La Vie de l’Auto en 1994. « En contrepartie, mes émoluments équivalaient au salaire d'un cadre moyen de la Régie. Trois semaines plus tard, sans faire de dessin et en travaillant au pifomètre avec des baguettes de bois pour corriger les lignes de carrosserie, le dessin de la Renault 8 était définitif. Fernand Picard et Pierre Dreyfus donnaient leur accord de fabrication à mon prototype ! »

Et tout le monde fut conquis, du réseau aux clients. Renault offrait alors à Philippe Charbonneaux la possibilité de créer une équipe de style, tout en lui laissant l'opportunité de conserver son cabinet indépendant. L'aventure dura deux ans, mais le designer ne réussissait pas à se fondre dans l’esprit de la Régie. On lui doit néanmoins les grandes lignes de la Renault 16 sortie en 1965.

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